Communauté d’agglomération : le conseil dit non.

Le Préfet de l’Ardèche vient de publier une carte réformant encore une fois les périmètres des communautés de communes. Autour d’Aubenas, il prévoit la création d’une communauté d’agglomération qui regrouperait 72 communes issues de la fusion de 5 communautés de communes sur les anciens cantons de Burzet, Thueyts, Montpezat, Aubenas, Vals, Villeneuve-de-Berg et Largentière. Elle s’étendrait du Col de la Chavade à Sceautres, de Pereyre à Saint-Maurice d’Ibie et La Souche ou Laurac.

Elle regrouperait 61 000 habitants.

En terme de compétence, cette communauté d’agglomération serait dotée de domaines d’actions très larges, dont l’eau potable, l’assainissement, la voirie, mais aussi l’urbanisme (Plan local d’Urbanisme intercommunal à l’échelle des 72 communes), ou encore les activités périscolaires.

Le conseil municipal de Saint-Étienne du 10 novembre s’est prononcé à l’unanimité contre ce projet. Voici les raisons de ce refus :

Pourquoi le conseil a-t-il refusé ce projet de communauté d’agglomération ?

Les raisons sont multiples, mais c’est d’abord l’ampleur du périmètre et son incohérence qui a motivé cette décision. Trop vaste, sans unité, il ne présage en rien d’une prise en compte correcte des besoins des habitants et des territoires. Il sera impossible de développer des actions cohérentes sur l’ensemble de ce territoire.

N’est-il pas pertinent en termes de moyens ?

Il n’offrira guère de moyens supplémentaires. Seulement une bonification faible de la dotation de fonctionnement, mais qui sera largement compensée par les dépenses de fonctionnement inhérentes à ce type de structures. Le faible argument financier n’est pas suffisant.

Il est en outre illusoire de croire que les moyens seront équitablement répartis sur le territoire et l’ensemble des communes. Les expériences identiques montrent que les interventions et les fonds se destinent généralement aux zones centrales qui se délestent de charges, mais que cela ne permet pas de développer des projets sur l’ensemble du territoire. C’est un constat.

Par contre, le conseil considère que la fusion de la communauté de communes du Pays d’Aubenas-Vals et de celle de Vinobre s’impose en considérant qu’elle permettrait d’agir sur l’ensemble de la zone urbaine d’Aubenas. Le conseil regrette même que cette fusion n’ait pas été décidée dès la vague de fusions précédentes, mais des “impératifs” politiques s’étaient alors imposés, plus qu’une notion de cohérence de territoire.

Et les projets qui sont susceptibles d’être réalisés par cette communauté d’agglomération ?

À ce jour, c’est une coquille vide, un trait sur une carte, sans aucun projet de territoire. Elle n’a pas été concertée, et n’a donc aucun sens. La seule justification très à la mode qui consisterait à dire qu’elle sera performante parce que vaste et concurrentielle ne tient pas. Ce territoire trop vaste nous paraît justement ingouvernable de manière équilibrée et équitable, en interne, avec un conseil d’agglo qui dépassera largement les 120 ou 130 membres.

Faire émerger des projets dans un ensemble aussi vaste est nécessairement long, complexe et usant. Il y a toujours une inertie très forte, sans compter les jeux politiciens détestables qui s’y développent.

Et cette communauté d’agglomération ne sera-t-elle pas de taille à rivaliser avec Valence ou Montélimar?

C’est ce qu’on entend dire, mais ce n’est pas la bonne approche. Nous ne serons jamais Valence ou Montélimar ! Notre place n’est pas là et ce n’est pas en jouant la concurrence avec plus grand que nous que nous pourrons y gagner quoi que ce soit. C’est stupide. C’est en mobilisant nos propres forces et nos atouts, les initiatives de citoyens, qu’il ne faut pas noyer dans des superstructures lourdes et inertes.

Et si des regroupements sont nécessaires entre collectivités, nous savons les réaliser ponctuellement, de manière souple, en fonction des besoins. C’est par exemple en ce qui nous concerne, la piscine couverte d’Aubenas réalisée par trois communautés de communes qui se sont unies, ou la zone d’activité des Traverses, à Lachapelle-sous-Aubenas.

N’y a-t-il pas un risque de passer à côté d’une opportunité ?

Non, ce n’est pas en ces termes hasardeux “d’opportunité” que la question se pose, en l’absence de projet. Et les délais courts, à peine un an avant la fusion proposée, ne permettent pas de travailler à toutes ces questions correctement. Il est même techniquement impossible de réaliser une fusion dans des délais aussi courts, sauf à la bâcler…

En outre, comment imaginer que les citoyens, qui sont las de ces bricolages institutionnels sur lesquels leur avis n’est jamais requis, vont s’y retrouver. La République a besoin d’institutions de proximité, humaines, qu’on nous demande de saborder au profit d’une technostructure lointaine et vide de sens démocratique. Nous préférons largement une collectivité qui permette l’essor des initiatives et l’autonomie des citoyens à des machines lourdes.

Chaque mandat ne doit pas non plus être celui du bricolage institutionnel. Nous avons été élus pour porter des projets, des réalisations, faire fonctionner des services pour les habitants. Pas pour fusionner des communautés de communes à longueur d’années, réorganiser des services et des administrations. C’est stérilisant pour l’action locale.

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